dimanche 16 janvier 2011

Domaine Pique-Basse, Vallée du Rhône méridionale, Roaix

"L'imprévu n'est pas l'impossible, c'est une carte qui est toujours dans le jeu." Un proverbe chinois dit que celui qui boit perd au jeu. Tout dépend de la donne. J’ai la main. Je pose mon premier article sur barrique : Domaine de Pique-Basse. J’annonce la couleur : j’aime ce vin, voici ma mise :   




De dr. à g. Mont Ventoux, Massif du Ventabren, Montagne de Mars
Le Domaine Pique-Basse d’Olivier Tropet est situé en Côtes du Rhône méridionales, dans la Vallée de l’Ouvèze, au pied du Massif du Ventabren, avoisinant les terroirs de Rasteau et de Cairanne. Sur les 30 hectares appartenant à la famille Tropet, seuls 8 ha sont vinifiés au domaine. Depuis 2007, date de la première vinification, une partie du Domaine est en reconversion agriculture biologique. Olivier s’inspire également des méthodes de la biodynamie pour permettre à son vignoble une régénération naturelle des sols. Il accompagne ses vignes avec le souhait de les mener vers plus de vitalité et plus d’autonomie.

Le domaine est exposé Est / Sud-Est ce qui assure un fort potentiel de fraicheur si on le compare au terroir solaire de Rasteau orienté sud-Ouest. Le sol se compose en grande partie d’argile et de limon, safre et sable. L'altitude s'élève jusqu’à 350 mètres sur le massif du Ventabren.   

L’encépagement
Grenache noir, Syrah, Mourvèdre, Aubin, Merlot, Cinsault, Grenache blanc

Mode de culture et vinification
A la vigne les grenaches sont en cordon sur fils releveurs. Dernier traitement au cuivre et au soufre fin juillet afin de préserver les populations levuriennes et de faciliter le départ en fermentation. Olivier tente de diminuer l'application de traitement, évite celui de la mi-Août dans la mesure du possible.

A la cave, naturellement, comme il n’y a pas de levures ajoutées, le départ en fermentation tardif (10 jours environ) présente un risque de développement de bactéries responsables de l’acide acétique. En anticipation, une semaine avant les vendanges, Olivier prépare des pieds de cuve pour permettre une fermentation sous deux jours. L’état sanitaire des vignes en  2010 a permis de ne pas utiliser de cuivre à la vigne, pas de soufre sur le pied de cuve et l’ensemble de la vendange.  
Les macérations des rouges sont longues (4 à 5 semaines) avec des grains entiers pour obtenir une saturation en CO2, une mise en atmosphère inerte et préserver la pureté aromatique. Olivier préfère travailler sous  atmosphère réductrice afin d’éviter l’oxydation des mouts, ce qui apparait dans ses cuvées. 
Les fermentations se font en cuve inox pour les blancs et les rosés en vin de pays, les cuves béton sont utilisées pour les Côtes du Rhône Village, les demis muids renversés sont utilisés pour les Syrah. 

Le Jeu.................................................................................................

L’Atout du Pique 2010, Côtes du Rhône blanc
1ere cuvée, presque anonyme
100 % grenache blanc Premier millésime, anonyme, non tarifé, très apprécié ! Terroir sablo-limoneux exposé à l’est, potentiel de bonne fraîcheur. 50 % ½ muid, 50 % cuve inox. Pas de fermentation malo-lactique. Non filtré. Une rareté dans le panorama des villages Roaix à dominante de rouge. 
Ce vin c’est de la joie ! Le nez a du fruit prêt-à-croquer, de l’abricot mûr et sec, de la pêche blanche, un fond brioché qui soutient l’ensemble. Une pointe amylique apparaît furtivement pour disparaître aussitôt et renoncer à la caricature. La bouche est vive et lumineuse, elle scintille légèrement (à peine mise en bouteille).  Le pH indique 3,2 environ. Cette trame acide est adoucie par un joli gras caractéristique du grenache blanc à maturité. C’est suave. La palette aromatique se complète de la flaveur pamplemousse, son arôme, sa vivacité et son amertume qui assied l’ensemble et donne du relief. Une pointe de fenouil accompagne la finale chaude et prolonge le plaisir. C’était bon, ça m’a plut ! J'espère que le vin se clarifiera naturellement et qu'il perdra sa légère opacité sans filtrage, afin de préserver sa matière. On pourrait alors le nommer "Le Coup d’éclat" !

Le Chasse-cœur, Vin de Pays du Vaucluse
Le Chasse-cœur 2009, Vin de Pays du Vaucluse
Aubun, Grenache, merlot, 7 € tarif public
Le nez exprime du fruit, du végétal, une pointe de réduit. L’attaque est souple avec un milieu de bouche charpenté et végétal sur le poivron, du fruit rouge, une finale chaude, épicée, réglissée. Ce vin pourrait gagner en harmonie sur l’assemblage. C’est assurément un vin pour la table qui accompagnera très bien une viande grillé.

Aubun, 100 %, Brut de cuve 2010
Cépage originaire du Vaucluse, destiné à la cuvée Le Chasse-cœur
Nez fruité, de cassis et bourgeon de cassis, avec une pointe de réduction et une légère note métallique. La bouche est ronde et souple en attaque, elle laisse une finale assez tannique. Les arômes se prolongent sur l’olive noire en tapenade. Cépage très intéressant à goûter.

L’As du Pique 2009
80 % grenache, 10 % syrah, 10 % mourvèdre en cuve béton, 10 € tarif public
Le nez légèrement réduit s’ouvre sur des notes de cacao, de genévrier, de poivre et d’épices. L’attaque est souple et se structure en milieu de bouche pour finir sur des tanins présents. Les arômes soulignent la maturité du fruit et déploient des notes réglisse, un fumé solaire, de l’eau de vie de marc et une fraicheur eucalyptique. La finale tendue, piquante, rappelle le zan. Très jolie cuvée.    

Grenache, 100 %, Brut de cuve 2010
Grenache déshydraté en sur-maturité, non éraflé, non commercialisé
Le nez est animal, avec du croquant de cassis et des notes florales. Très agréable en bouche avec de la rondeur et de l’opulence, du fruit, du cassis, de la violette, une pointe de rose, du poivre. Le sucre résiduel apporte de la douceur. J'en  m'en délecte avec un carreau de chocolat noir de Madagascar, frais aux notes de fruits rouges.

Grenache 100 %,  jus de presse
Élevage sur fut de 3 vins, destiné au Rasteau
Le nez présente du fruit sur-mûri, des cerises à l’alcool, de l’amaretto et du café. Une attaque souple et acidulée, il est croquant et juteux. Marqué par la torréfaction et l’oxydationC'est un délice, une gourmandise à lui seul.

Grenache 100 %,  jus de goutte
Élevage sur fut de 2 vins, destiné au Rasteau
Perlant, plus de fruit frais et plus d’amertume finale.

 Au Cœur du Ventabren 2009, Côtes du Rhône Village Roaix
Terroir argileux en altitude sur le massif de Ventabren, 100 % Syrah de 30 ans, rendement de 30 hl/ha. 15 € tarif public
Piquée au cœur, ce vin m’a séduite par la richesse de sa palette aromatique, sa précision, son allure corsetée, son opulence à peine dissimulée et sa délicatesse. La robe est rubis à reflets violacés intenses. Le nez  est souligné par un bâton de vanille de Madagascar opulente et animale. Ça sent l’orchidée. Le bois fait corps avec l’ensemble. La bouche puissante a de la fraicheur avec ce qu’il faut de poivre, d’épices et de minéralité sans galvaudage. La trame tannique est très bien structurée, fondue et tendue en finale. Les effluves se prolongent. Le troisième nez révèle de l’olive noire, une pointe d’ylang-ylang et de vanille. Superbe.

Le Pli.......................................................................................................
Olivier a joué toutes ses cartes à découvert et a remporté le pli !  Son accueil a été  chaleureux et il a été généreux dans l’explication de ces choix, de sa manière de travailler. Les bruts de cuve 2010 présentent un bon l'équilibre. La signature est  affirmée : fraicheur, trame tannique bien structurée, d'abord souple et fondue, expression finale avec panache donnant longueur et puissance. L’Atout du Pique  me semble très prometteur, j'attends avec impatience la mise en bouteille pour voir son évolution. L'As du Pique est un joli cœur de gamme à boire lors de repas de style méridional ou provençal, en famille ... j'ai eu envie d'une ratatouille bien confite et d'agneau mijoté !  Quant à la Dame de cœur par élégance, Au Cœur de Ventabren, elle demeure la carte à étendre au jeu subtil de l'Amour et du Hasard.  

mardi 4 janvier 2011

Vanité des Vanités, tout est Vanité !

Depuis quelques jours, je suis obnubilée par les Vanités et leurs représentations contemporaines. Parmi la foultitude de crânes et autres têtes de mort, celles qui m’entêtent sont composées de fruits et légumes opulents, colorés, invitant à les croquer tout cru ! Outre qu’en ce début d’année une de mes Hautes Résolutions est de diminuer la part de féculents dans mon alimentation au profit de légumes verts, il y a là une marotte dont je compte m'émanciper dès à présent !
  
Analyse conceptuelle…
Les Vanités* célèbrent la futilité et l’éphémère de la vie. Le temps qui passe, qui fane, fait se décomposer, moisir, faisander, périr et disparaître les corps; ce temps s’inscrit dans un devenir à l’issue fatale et sans surprise. 
* Une vanité est un type de nature morte dont la composition allégorique suggère que l'existence terrestre est  éphémère, vaine, la vie humaine précaire et de peu d'importance. 

Si la tradition veut que les Vanités soient une manifestation sensible de la mort, elles demeurent surtout une expérience du vivant, une expérience sensible et sensorielle riche. Elles témoignent ainsi d’un rapport ambivalent au monde et à la vie …. 

...Croquer ou ne pas croquer, telle est la question !

J’ai été assaillie par cette interrogation existentielle récemment… Le 31 décembre 2010, j’ai crée ce blog, j’ai écrit mes premières lignes timides en enfilade silencieuse. Bien sûr, j’ai manqué d’audace. J’ai disparue sous une glose lisse et universitaire.  Mes amis me l’ont fait payer ! 
Comme "l'amitié est une source inépuisable de mécontentement et de rage dont il serait déraisonnable de vouloir se passer"**, après mûre apostille, je craque
** Cioran 
 

 je croque !  A pleines dents, chacun des mots alignés ici !


Chaque mot exprimant un goût possède une saveur singulière qui se chique, se mâchouille, se mâche, se balbutie et s’articule.
Passionnés du goût, amateurs de vin, de thé, de chocolat, de cigare, de whisky, parleur et auteur du goût, vous êtes tout comme moi pris dans une oralité qui s’élabore et dont l’élocution se veut sans bavure, quoi qu’un crachat passe encore plutôt bien. C’est une quête de l’oralité absolue qui nous anime. J’affirme sans sourciller (NDLR).

Quête soutenue par La Vanité de chacun, puisqu’il faut prendre la parole, dire Je, se faire Auteur et… se dégager du discours de l’Autre.

Un blog est un espace où la singularité a ses droits. Moi j’ai le vent en poupe et le blog en vogue depuis que je m’accorde cette liberté. J'ai même envie d'écrire par générosité envers l'autre*** et non plus par crainte de son jugement !
*** Cet autre qui pourrait bien être mon meilleur ami

Le jugement de goût lors de la dégustation a besoin de ce parti pris pour soi. Il exprime lui aussi une singularité qui est perpétuellement mise à l’épreuve du Bon Goût. Aussi, faut-il veiller pour déjouer l’écueil inhérent à cette expérience du vivant qu’est la dégustation. 

Déguster est une posture existentielle qui me transforme. Je sens à cet instant que c’est le rouge profond au crépuscule du monde que mon goût désire.

dimanche 2 janvier 2011

Flaveur

Terme de physiologie désignant "l'ensemble complexe des sensations olfactives, gustatives et trigéminales perçues lors de la dégustation...". 
Contrairement à ce qui est écrit dans les dictionnaires actuels, Larousse, Robert, etc...flaveur existe bien en français et ne vient pas de l'anglais. 
Source : Évaluation sensorielle, Manuel méthodologique 3ème édition. Lavoisier Edition TEC&DOC, 2009, p 506 


Hédonique

"se rapporte au caractère plaisant ou déplaisant"

Esthétique

Terme philosophique emprunté au latin aesthetica employé par le philosophe allemand A. G. Baumgarten (1717-62) dans son ouvrage Aesthetica acroamatica (1750-58); terme formé sur le gr. αἰσθητικός, « qui a la faculté de sentir; sensible, perceptible ». 
 cf. αἰσθάνομαι « percevoir par les sens, par l'intelligence ».

Organoleptique

"qualifie une propriété d'un produit perceptible par les organes des sens : le goût, l'odorat, la vue, le toucher, l'ouie" 
exemple : la saveur sucrée est une propriété organoleptique perceptible par le sens du goût.